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Ratification universelle de la convention n°182 de l’OIT sur le travail des enfants : quelle place pour l’éthique ?

Par Raphaël Maurel

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Le 4 août 2020, l’Organisation internationale du travail annonçait que « [l]es 187 États Membres de l’Organisation internationale du Travail (OIT) ont tous ratifié la Convention (n° 182) de l’OIT sur les pires formes de travail des enfants, 1999 »[1]. Avec la ratification du Royaume des Tonga, la Convention 182 est dès lors devenue « la convention la plus rapidement ratifiée dans l’histoire de l’Organisation, depuis son adoption par la Conférence internationale du Travail il y a 21 ans »[2]. « Résultat historique », « moment historique », « rappel puissant et opportun de l’importance des normes de l’OIT »[3], la ratification universelle a été « saluée » de toutes parts.

Du point de vue du droit international, la ratification d’un traité est un acte unilatéral engageant l’État ratifiant à respecter son contenu. De point de vue éthique, cet acte est a priori neutre. Les États, comme les opinions publiques, peuvent en effet considérer que la ratification de tel traité va dans le sens d’une meilleure protection des droits humains, auquel cas la ratification pourra être perçue et présentée comme une action éthique – et son absence de ratification pourra le cas échéant être dénoncée et qualifiée d’omission non éthique par la société civile. À l’inverse, la ratification de tel traité facilitant le commerce de produits polluants ou dont la fabrication méconnaît notoirement certains principes éthiques – à l’instar du travail des enfants ou de la pollution des sols – pourra être considérée comme non éthique et dénoncée par la société civile, comme l’ont montré certains débats relatifs au CETA / AECG. En théorie, l’acte de ratifier un traité, de manière universelle ou non, n’est donc ni éthique ni non éthique : cette qualification ne peut être déterminée qu’in concreto, après examen de son objet, de son contenu et de ses conséquences.

 

Pourtant, il existe, nous semble-t-il, une forme de « présomption d’action éthique » lorsqu’il est question de la ratification certaines conventions, en particulier celles relatives à la protection des droits humains et celles de l’OIT. En suivant cette idée, il n’y qu’un pas à franchir pour considérer que la ratification de la Convention n°182, relative aux « pires » formes de travail des enfants, est en elle-même porteuse d’un message éthique, sans préjudice de son contenu.

 

Cette proposition est difficilement démontrable sur le plan juridique, car elle ne relève pas du champ de la science juridique. Cependant, sa vérification est susceptible d’apporter des éléments de réflexion plus généraux quant aux relations entre le droit international et l’éthique. Le raisonnement proposé est néanmoins, précisons-le, purement prospectif voire théorique : il se fonde sur le postulat selon lequel il existe une présomption de relation entre la ratification universelle de la Convention n°182 et le champ de l’éthique.

 

On peut alors, sur la base de ce « préjugé » non juridique selon lequel la ratification de la Convention n°182 constitue une action éthique, soulever un certain nombre de questions relatives aux rapports qu’entretiennent, dans l’imaginaire collectif, le droit international et l’éthique. Quelques-unes peuvent être traitées ici. D’une part, quel est le fondement de cette « impression générale » selon laquelle la Convention n°182 – parmi d’autres – est porteuse d’un message éthique (I) ? D’autre part, l’analyse du contenu de la Convention n°182 conforte-t-elle la présomption selon laquelle sa ratification est un acte globalement éthique (II) ? Enfin, le caractère « universel » de la ratification est-il ce qu’on pourrait nommer un « fait international éthique », ou plus généralement a-t-il un impact quelconque sur les liens entre la Convention n°182 et l’éthique (III) ?

 

I. La présomption de l’existence d’un lien entre la Convention n°182 et le champ de l’éthique

 

À notre connaissance, les déclarations officielles de politique étrangère, et globalement le discours juridique des États, ne font pas de lien direct entre la Convention n°182 et le champ de l’éthique[4]. Ce discours associant les conventions de l’OIT à l’éthique est porté par les organisations représentantes de la société civile – à l’instar du collectif « Éthique sur l’étiquette »[5], pour ne prendre qu’un exemple – et, surtout, par les entreprises multinationales. La Convention est en effet citée par d’innombrables codes de conduite interne ou codes fournisseurs de grandes entreprises, souvent présentés comme des codes/chartes/principes d’éthique. Pour ne prendre que quelques exemples, les entreprises Limagrain[6], Corning[7], Casino[8], Sanofi[9], JCDecaux[10] ou encore Nestlé[11], cette liste étant loin d’être exhaustive, présentent la Convention n°182, et souvent d’autres instruments de l’OIT ou non, comme les sources directes des « principes éthiques » ou « valeurs éthiques » de l’entreprise, voire indiquent que l’instrument est respecté et directement applicable au sein de l’entreprise.

 

Ainsi, le sentiment selon lequel il existe un lien plus ou moins direct entre la Convention n°182 et l’éthique repose largement sur le discours des entreprises multinationales. Il n’est pas anodin de relever que ce dernier repose sur un raccourci juridique : ces entreprises ne sont pas directement liées par ces conventions, qui s’adressent aux personnes juridiques reconnues par le droit international – c’est-à-dire les États. Annoncer respecter la Convention n°182, pour une entreprise multinationale, constitue dès lors une opération communicationnelle globalement dénuée de réalité juridique. Une entreprise peut être contrainte, par les droits internes dont elle relève à l’occasion de ses activités, de respecter les dispositions transposant la Convention, et peut décider d’appliquer dans tous les cas les principes que les États ont adoptés, y compris dans l’hypothèse où ces derniers ne les lui imposeraient pas. Néanmoins et dans la mesure où les législations nationales peuvent varier quant à la transposition de la Convention, il s’agit là plus d’un positionnement communicationnel de l’entreprise qui décide de se revendiquer de la Convention que d’une obligation juridique d’y faire textuellement référence – d’autant que la valeur des codes de conduite est elle-même discutée[12].

 

Autrement dit, la présomption – qui nous semble, subjectivement, répandue dans l’opinion publique – selon laquelle la Convention n°182, « convention fondamentale » de l’OIT, relève du champ de l’éthique constitue avant tout une construction intellectuelle façonnée et diffusée par le discours juridique des entreprises multinationales.

 

II. Un contenu justifiant l’assimilation de la ratification de la Convention n°182 à un acte éthique ?

 

Du point de vue du droit international, le contenu de la Convention dont la ratification universelle est annoncée ne s’analyse pas prioritairement – voire pas du tout – comme un texte promouvant une certaine éthique. Tel n’est pas le sens historique des conventions de l’OIT, et le fait que la Convention n°182 constitue l’une des huit conventions « fondamentales » de l’OIT ne confère pas une dimension éthique spécifique à cet instrument.

Certes, le titre de la Convention, qui annonce porter sur « les pires formes de travail des enfants », crée un horizon d’attentes a priori favorable à une analyse sous l’angle éthique, sans préjudice du discours des entreprises multinationales. Cependant, cette connotation axiologique appelle d’emblée la discussion : si la convention ne s’adresse qu’aux « pires » formes de travail, constitue-t-elle réellement une avancée éthique, et sa ratification universelle ne dissimule-t-elle pas l’absence de percée universelle d’autres instruments relatifs à toutes les formes de travail des enfants ? L’analyse du contenu de la Convention n°182, éludée par le discours juridique des entreprises multinationales, apparaît à ce stade indispensable.

 

L’article 3 de la Convention précise que l’expression « pires formes de travail des enfants » recoupe :

 

« (a) toutes les formes d’esclavage ou pratiques analogues, telles que la vente et la traite des enfants, la servitude pour dettes et le servage ainsi que le travail forcé ou obligatoire, y compris le recrutement forcé ou obligatoire des enfants en vue de leur utilisation dans des conflits armés;
(b) l’utilisation, le recrutement ou l’offre d’un enfant à des fins de prostitution, de production de matériel pornographique ou de spectacles pornographiques;
(c) l’utilisation, le recrutement ou l’offre d’un enfant aux fins d’activités illicites, notamment pour la production et le trafic de stupéfiants, tels que les définissent les conventions internationales pertinentes;
(d) les travaux qui, par leur nature ou les conditions dans lesquelles ils s’exercent, sont susceptibles de nuire à la santé, à la sécurité ou à la moralité de l’enfant ».

 

La détermination des travaux mentionnés par l’article 3 (d) est réalisée « par la législation nationale ou l’autorité compétente, après consultation des organisations d’employeurs et de travailleurs intéressées, en prenant en considération les normes internationales pertinentes » (article 4.1). L’absence d’harmonisation, qui paraît logique dans la mesure où la question de la « moralité » de l’enfant est soulevée, demeure problématique : sauf volontarisme étatique marqué, ne sont finalement visées par la Convention l’esclavage, le recrutement d’enfants-soldats, la prostitution et le recrutement à des fins d’activités illicites comme le trafic de stupéfiants. La recommandation n°190 de 1999 concernant l’interdiction des pires formes de travail des enfants et l’action immédiate en vue de leur élimination, d’ailleurs annexée au formulaire de rapport que doivent régulièrement compléter les États parties[13], délivre des compléments mais précise surtout, au conditionnel, qu’« en déterminant les types de travail visés à l’article 3 d) de la convention et leur localisation, il faudrait, entre autres, prendre en considération » :

 

« a) les travaux qui exposent les enfants à des sévices physiques, psychologiques ou sexuels
b) les travaux qui s’effectuent sous terre, sous l’eau, à des hauteurs dangereuses ou dans des espaces confinés;
c) les travaux qui s’effectuent avec des machines, du matériel ou des outils dangereux, ou qui impliquent de manipuler ou porter de lourdes charges;
d) les travaux qui s’effectuent dans un milieu malsain pouvant, par exemple, exposer des enfants à des substances, des agents ou des procédés dangereux, ou à des conditions de température, de bruit ou de vibrations préjudiciables à leur santé;
e) les travaux qui s’effectuent dans des conditions particulièrement difficiles, par exemple pendant de longues heures, ou la nuit, ou pour lesquels l’enfant est retenu de manière injustifiée dans les locaux de l’employeur ».

 

L’essentiel du contenu de la Convention réside dans cet article 3, dans la mesure du possible interprété conformément à la recommandation 190. Les autres dispositions relèvent en effet de l’application : localisation des types de travail visés (article 4), établissement des « mécanismes appropriés pour surveiller l’application des dispositions donnant effet à la présente convention » (article 5), mise en œuvre par les États de « programmes d’action en vue d’éliminer en priorité les pires formes de travail des enfants » (article 6), prise de « toutes les mesures nécessaires pour assurer la mise en œuvre effective et le respect des dispositions donnant effet à la présente convention, y compris par l’établissement et l’application de sanctions pénales ou, le cas échéant, d’autres sanctions » (article 7), désignation d’une « autorité compétente chargée de la mise en œuvre » (idem), ou encore entraide, coopération et assistance dans la mise en œuvre (article 8). Seul l’article 7.2 de la Convention s’avère plus précis, indiquant que :

 

« Tout Membre doit, en tenant compte de l’importance de l’éducation en vue de l’élimination du travail des enfants, prendre des mesures efficaces dans un délai déterminé pour:
(a) empêcher que des enfants ne soient engagés dans les pires formes de travail des enfants;
(b) prévoir l’aide directe nécessaire et appropriée pour soustraire les enfants des pires formes de travail des enfants et assurer leur réadaptation et leur intégration sociale;
(c) assurer l’accès à l’éducation de base gratuite et, lorsque cela est possible et approprié, à la formation professionnelle pour tous les enfants qui auront été soustraits des pires formes de travail des enfants;
(d) identifier les enfants particulièrement exposés à des risques et entrer en contact direct avec eux;
(e) tenir compte de la situation particulière des filles ».

 

La Convention n°182 est donc un instrument particulièrement bref et peu dense, ce qui s’explique par son contexte d’adoption. C’est en effet face aux difficultés de mise en œuvre de la Convention n°138 sur l’âge minimum de 1973 que la rédaction d’un nouvel instrument volontairement plus limité fut initiée[14]. Au regard de son contenu, rien ne permet de penser que cette convention constitue une avancée éthique ou promeut particulièrement des normes éthiques. Son champ d’application est, comme son nom l’indique, limité à quelques formes de travail des enfants considérées comme les « pires » par les rédacteurs, de sorte que plusieurs sont occultées. Le travail de nuit des enfants, visé par deux autres conventions très faiblement ratifiées[15], ne fait par exemple l’objet que d’une recommandation émettant le souhait que les États le prennent « en considération » lorsqu’ils déterminent souverainement les formes de travail ayant un impact sur la santé de l’enfant. Autrement dit, la Convention n°182 constitue avant tout un standard minimum, susceptible d’être admis par tous, face à l’impossibilité de s’accorder rapidement et massivement sur l’interdiction de formes de travail « moins graves » des enfants – impossibilité qui pourrait aisément prêter le flanc à des critiques sur le plan éthique.

 

Au regard de ce qui précède, la plus-value éthique de la Convention n°182 apparaît ténue, alors que ses apports sur le plan juridique sont plus évidents. Il n’est pas niable que l’interdiction des « pires » formes de travail des enfants peut être jugée morale et que le choix de s’y conformer est éthique. Cependant, il apparaît que c’est moins le contenu concret de la Convention n°182 que le fait de s’y référer qui lui confère un contenu notoirement « éthique ». Le fait que États ne voient – pour l’instant ? – pas d’intérêt à raisonner, sur le plan sémantique, en termes d’« éthique » lorsqu’il est question de la ratification de cette Convention tend à confirmer cette conclusion : le contenu de la Convention n°182 ne relève pas particulièrement de l’éthique.

 

Une dernière hypothèse demeure à examiner pour confirmer, ou infirmer, l’existence d’un lien entre la Convention n°182 et le champ de l’éthique dans l’ordre juridique international.

 

III. La ratification universelle, vectrice d’une certaine éthique internationale ?

 

Selon ce dernier point de vue – d’autres étant, au demeurant, probablement possibles –, ce ne serait pas le contenu de la Convention n°182 qui fonderait, en droit, le caractère éthique de sa ratification. Ce raisonnement consiste, en tirant les conséquences de l’absence de contenu spécifiquement éthique de la Convention, à écarter le discours juridique des entreprises multinationales sur ce point et à considérer l’hypothèse selon laquelle la ratification universelle est en elle-même porteuse d’un message éthique.

 

L’universalité de la ratification d’une convention internationale, en particulier lorsqu’elle est relative à la protection des droits de l’homme, des droits sociaux ou de la protection de l’environnement, est généralement jugée comme une bonne chose. La communication institutionnelle des États et des organisations internationales présente en effet la ratification d’un traité par un État comme un élément positif, éthiquement satisfaisant – sans utiliser pour autant la rhétorique de l’éthique. La ratification « universelle » constitue ainsi un but : l’organisation internationale se réjouit du dépôt d’un nouvel instrument de ratification, qui contribue à atteindre ce noble objectif.

 

Plusieurs remarques peuvent être formulées à ce propos. D’abord, et dans la continuité des propos qui précèdent, ce type de discours ne fait pas cas du contenu du traité ratifié : une ratification est saluée en tant que telle[16], tandis qu’un retrait est accueilli de manière négative. L’action de ratifier, voire l’expression de l’intention de ratifier[17], est ainsi perçue, et présentée, comme « un pas significatif » vers des objectifs positifs : l’entrée en vigueur d’une convention[18] ou sa ratification universelle. Ce discours relatif à la ratification n’est pas neutre du point de vue axiologique, et invite ainsi la communauté internationale comme l’opinion publique à considérer la ratification d’un traité – peu important son contenu – comme un acte éthique, la ratification universelle comme un objectif éthique et l’absence de ratification comme une omission négative, voire non éthique.

 

Ce peu de considération pour le contenu du traité universellement ratifié entraîne un décentrement du débat : ce ne sont ni les normes ni leur effectivité qui sont commentées sous l’angle éthique, mais le positionnement massif et unanime des États, quand bien même ceux-ci ne se positionnement pas officiellement dans le champ de l’éthique. Cependant, rappelons d’abord que l’unanimité est relative, l’universalité étant circonscrite aux parties à l’Organisation en question, ici l’OIT. À ce jour, 187 États sont membres de l’OIT, après l’adhésion des Tonga en 2016. Rares sont pourtant les observateurs qui rappellent que certains États ne sont pas membres de l’OIT (notamment la Corée du Nord, Monaco, Andorre et le Bhoutan) et que la ratification de la Convention n°182 n’est, en conséquence, que relativement universelle[19]. D’autre part, tout comme son contenu est ignoré de ce type de raisonnement, il n’est pas fait de cas de l’application et de l’effectivité de la Convention n°182.

 

Enfin, on peut relever que la « ratification universelle » de la Convention n°182 n’est intervenue que 21 ans après son adoption, ce qui paraît particulièrement long. Doit-on réellement se féliciter de cette ratification de – seulement – tous les membres de l’OIT, sans considération pour le contenu du traité, pour son effectivité, ni pour le caractère particulièrement laborieux de cet aboutissement ? Du point de vue du droit international, il n’existe naturellement pas de réponse : la question n’est en aucun cas juridique. Du point de vue de l’éthique, il paraît aventureux de se féliciter sans réserve de cette avancée.

 

Du point de vue des relations entre le droit international et l’éthique, il est possible de conclure que la présomption, prégnante dans l’opinion publique, selon laquelle la ratification – a fortiori « universelle » – d’un instrument social et/ou relatif aux droits humains est un acte éthique, est un contresens. Au terme de cette rapide réflexion, il apparaît en effet qu’il n’existe pas de lien entre la ratification universelle de la Convention n°182 et le champ de l’éthique, quand bien même le discours juridique des entreprises multinationales tend à présenter – ou à faire en sorte que le public se représente – cette relation comme évidente. Autrement dit, il n’existe à notre sens pas d’argument permettant de fonder l’idée selon laquelle l’acte juridique étatique consistant à ratifier une convention internationale est un acte éthique. Démonstration a été faite d’une idée évoquée en introduction : cette qualification peut dépendre du contenu de la convention en question, mais ne peut être postulée a priori.

 

***

 

Il pourrait finalement être objecté aux développements qui précèdent qu’ils portent sur une question qui ne se pose pas : aucun État ni organisation n’a affirmé, il est vrai, que la ratification universelle de la Convention n°182 était un acte éthique, de sorte que la recherche d’un éventuel lien serait artificielle. Pourtant, il nous semble que le discours général des entreprises multinationales, conjugué à la communication institutionnelle de l’OIT, est de nature à faire naître une confusion à ce propos. Celle-ci est possiblement fondée sur le fait que, dans le discours médiatique contemporain, l’éthique est devenue – ou a été conçu comme – un argument communicationnel et un enjeu commercial. Ce nécessaire recul sur la manière dont est utilisé l’argument éthique dans la société internationale amène, au regard de l’absence constatée de lien entre ratification universelle d’un instrument social d’une part, et éthique d’autre part, à poser plus globalement une question plus large : les droits humains sont-ils, in fine, solubles dans le champ de l’éthique ? De futurs travaux seront amenés à aborder cette délicate question.

 


 

[1] Site internet de l’OIT, page Actualités.

[2] Idem.

[3] Idem.

[4] Le lien a parfois pu être fait avec le « commerce équitable » ; voir par exemple la déclaration officielle de politique étrangère française du 22 août 2013 « Lutte contre le travail des enfants – Réponse du ministère du commerce extérieur à une question écrite au Sénat (Paris, 22 août 2013) ».

[5] Voir la page consacrée aux conventions de l’OIT, citant expressement la Convention n°182 : https://ethique-sur-etiquette.org/Les-conventions-de-l-OIT.

[6] Voir les Principes éthiques et code de conduite du groupe Limagrain (mars 2019), qui précisent en quatrième de couverture que « Ces Principes Éthiques et ce Code de Conduite s’inscrivent dans le cadre de plusieurs textes internationaux dont le Groupe Limagrain partage les principes : […] les conventions principales de l’Organisation Internationale du Travail, notamment les conventions 29, 105, 138 et 182 (lutte contre le travail des enfants et le travail forcé), 155 (santé et sécurité des travailleurs), 111 (lutte contre les discriminations), 100 (rémunérations), 87 et 98 (liberté syndicale, droit d’organisation et de négociation collective) » (https://www.google.com/url?sa=t&rct=j&q=&esrc=s&source=web&cd=&ved=2ahUKEwiF78XW6rnsAhVGUxoKHZpeA5cQFjABegQIAxAC&url=https%3A%2F%2Fwww.limagrain.com%2Fdata%2Fmedias%2F3791%2Fstyle%2Fdefault%2FLimagrain_Code_de_Conduite_2019_FR.pdf&usg=AOvVaw1GTIR1AOZRWmRJg3E1tJhL).

[7] Code de conduite du Fournisseur (août 2020), Corning Incorpored : « Le Code de conduite du fournisseur de Corning reprend les principes essentiels des huit conventions fondamentales de l’Organisation internationale du Travail (OIT) », dont la convention n°182 (https://www.google.com/url?sa=t&rct=j&q=&esrc=s&source=web&cd=&cad=rja&uact=8&ved=2ahUKEwi35Jub7bnsAhWNAWMBHQchBawQFjACegQIBRAC&url=https%3A%2F%2Fwww.corning.com%2Fmedia%2Fworldwide%2Fglobal%2Fdocuments%2FSupplier%2520Code%2520of%2520Conduct%2520November%25202018_French.pdf&usg=AOvVaw0_caHVPY_QfVZBYDO5-6uV).

[8] Charte Éthique Fournisseurs, Casino (avril 2020), où la Convention est citée parmi les « textes de référence », p. 6 (https://www.google.com/url?sa=t&rct=j&q=&esrc=s&source=web&cd=&ved=2ahUKEwi35Jub7bnsAhWNAWMBHQchBawQFjALegQIURAC&url=https%3A%2F%2Fwww.groupe-casino.fr%2Fwp-content%2Fuploads%2F2020%2F04%2FCharte-Ethique-Fournisseurs_FR_2020.pdf&usg=AOvVaw2XC1LGj2LF4jwBWDF_XQ_j).

[9] Code de conduite des fournisseurs du groupe Sanofi (non daté), qui reprend textuellement l’article 3 (d) de la Convention 182 et la cite en référence p. 2 (https://www.google.com/url?sa=t&rct=j&q=&esrc=s&source=web&cd=&ved=2ahUKEwi35Jub7bnsAhWNAWMBHQchBawQFjAHegQIWBAC&url=https%3A%2F%2Fwww.sanofi.fr%2F-%2Fmedia%2FProject%2FOne-Sanofi-Web%2FWebsites%2FEurope%2FSanofi-FR%2Fnous-connaitre%2Fethique%2FCode-de-conduite-des-fournisseurs-de-Sanofi.pdf&usg=AOvVaw2xG6p_IZnObF90JWEb8Mpm).

[10] Charte Internationale des Valeurs Sociales Fondamentales, JCDecaux (2018), qui précise p. 8 que « JCDecaux condamne le travail des enfants et s’engage à ne pas avoir recours au travail de personnes dont l’âge est inférieur à celui de l’achèvement de la scolarité obligatoire dans le pays concerné, ou ayant en tout état de cause, moins de 15 ans, conformément aux Conventions No. 138 et No. 182 de l’OIT ». (https://www.google.com/url?sa=t&rct=j&q=&esrc=s&source=web&cd=&ved=2ahUKEwi35Jub7bnsAhWNAWMBHQchBawQFjAXegQIMhAC&url=https%3A%2F%2Fwww.jcdecaux.com%2Ffr%2Fjcdecaux%2Fdownload-file%2F%3Furl%3Dpublic%253A%2F%2Fassets%2Fdocument%2F2019%2F10%2Fcharteinternationaledesvaleurssocialesfondamentalesjcdecaux2018.pdf&usg=AOvVaw3D6zguE7mAAfwQ3OeW-Q5G).

[11] Code de conduite pour les fournisseurs de Nestlé (décembre 2013), qui indique p. 2 qu’il « est strictement interdit au Fournisseur d’avoir recours au travail des enfants, conformément aux conventions de l’OIT n° 138 sur l’âge minimum et n° 182 sur l’élimination des pires formes de travail des enfants. […] Si le Fournisseur emploie de jeunes ouvriers, il doit apporter la preuve que l’emploi de jeunes n’expose pas ceux-ci à des risques physiques excessifs pouvant nuire à leur développement physique, mental ou émotionnel » (https://www.google.com/url?sa=t&rct=j&q=&esrc=s&source=web&cd=&cad=rja&uact=8&ved=2ahUKEwi35Jub7bnsAhWNAWMBHQchBawQFjAaegQIRBAC&url=https%3A%2F%2Fwww.nestle.com%2Fasset-library%2Fdocuments%2Flibrary%2Fdocuments%2Fsuppliers%2Fsupplier-code-french.pdf&usg=AOvVaw0i0stl-oU23OSfjA-1ZqhG).

[12] Sur cette question, voir parmi de nombreuses références la thèse de M. Larouer, Les codes de conduite, sources du droit, Dalloz, Nouvelle Bibliothèque de Thèses, vol. 176, 2018, 598 p. À notre sens et indépendamment des qualifications des ordres juridiques étatiques, une perspective pluraliste permet de considérer le code de conduite comme une source de droit interne de l’entreprise multinationale, dans la mesure où elle génère son propre ordre juridique (v. sur cette question R. Maurel, Les sources du droit administratif global, Thèse soutenue le 2 décembre 2019, Université Clermont Auvergne, à paraître en 2021). Le code d’éthique peut donc intégrer, dans l’ordre juridique de l’entreprise, le contenu des conventions de l’OIT ; il n’en demeure pas moins que cette intégration n’a aucune valeur dans l’ordre juridique international.

[13] Voir pour un exemple : https://www.ilo.org/dyn/normlex/fr/f?p=NORMLEXPUB:51:0::NO:51:P51_CONTENT_REPOSITORY_ID:2543562:NO.

[14] Le rapport du Sénat français sur le Projet de loi relatif au travail des enfants relève à ce propos que « La volonté de prolonger la convention n° 138 de l’OIT par un instrument plus limité mais plus contraignant, résulte d’un double constat : – la convention n° 138 s’avère difficile à mettre en œuvre, – il importe de lutter en priorité contre les formes les plus inadmissibles du travail des enfants. La convention n° 138 qui traite globalement de la question du travail des enfants, apparaît à de nombreux États, trop complexe et difficile à mettre en œuvre dans le détail, compte tenu des nombreuses possibilités de dérogations qu’elle prévoit. Cette complexité a longtemps freiné le mouvement de ratification de la convention et constitue toujours un obstacle à son application effective. Le cheminement très progressif vers l’abolition du travail des enfants, tel qu’envisagé par la convention n° 138, est apparu beaucoup trop lent au regard des formes les plus intolérables de travail des enfants » (Rapport n° 46 (2000-2001) de M. Xavier PINTAT, fait au nom de la commission des affaires étrangères, déposé le 25 octobre 2000, accessible en ligne : http://www.senat.fr/rap/l00-046/l00-046_mono.html).

[15] Convention (n° 90) sur le travail de nuit des enfants (industrie) (révisée), 1948, ratifiée par seulement 51 États (https://www.ilo.org/dyn/normlex/fr/f?p=NORMLEXPUB:12100:0::NO:12100:P12100_INSTRUMENT_ID:312235:NO), faisant suite à la Convention (n° 6) sur le travail de nuit des enfants (industrie), 1919, ratifiée par 59 États et dénoncée par 9 États – certains pour ratifier la version révisée de 1948, d’autres non, comme la Guinée, le Mexique, le Sri-Lanka, la Tunisie et l’Uruguay (https://www.ilo.org/dyn/normlex/fr/f?p=NORMLEXPUB:12100:0::NO:12100:P12100_INSTRUMENT_ID:312151:NO).

[16] Voir par exemple la communication autour de la ratification, par l’Inde, des conventions n°138 et 182 : https://www.ilo.org/global/about-the-ilo/newsroom/news/WCMS_557710/lang–fr/index.htm.

[17] Par exemple en mars 2020, à propos de la ratification possible de la convention n° 190 sur la violence et le harcèlement dans le monde du travail par quatre États (Argentine, Finlande, Espagne, Uruguay) : https://www.ilo.org/global/about-the-ilo/newsroom/news/WCMS_737636/lang–fr/index.htm.

[18] Par exemple, la ratification par l’Uruguay (premier État à le faire en juin 2020) de la convention n° 190 : https://www.ilo.org/global/about-the-ilo/newsroom/news/WCMS_747851/lang–fr/index.htm.

[19] Pour citer une exception francophone, voir cet article du Figaro : https://www.lefigaro.fr/conjoncture/la-convention-sur-les-pires-formes-de-travail-des-enfants-enfin-adoptee-a-l-unanimite-au-bout-de-21-ans-20200804.


Pour citer cette note : MAUREL Raphaël, « Ratification universelle de la convention n°182 de l’OIT sur le travail des enfants : quelle place pour l’éthique ? », Blog INTER-ÉTHIQUE, octobre 2020, en ligne : https://blog.u-bourgogne.fr/droit-inter-ethique/2020/10/19/ratification-universelle-de-la-convention-n182-de-loit-sur-le-travail-des-enfants-quelle-place-pour-lethique/
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De l’éthique dans la jurisprudence de la Cour internationale de justice ? L’exemple de l’interdiction du recours à la force dans l’arrêt Activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci

Par Raphaël Maurel

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Dans une contribution publiée en 1997, le Professeur Christian Dominicé partait à la recherche de « principes d’éthique internationale » irrigant le droit international contemporain. Plus précisément, l’auteur recherchait les traces d’une « éthique des relations internationales » dans la jurisprudence de la Cour internationale de justice, y voyant une force créatrice du droit international[1] :

« Lorsqu’elle met en lumière des principes fondamentaux dont elle souligne l’appartenance au droit international général, la jurisprudence, et singulièrement celle de la Cour de La Haye, leur imprime un sceau robuste, profond. Il est donc important d’en observer tout à la fois l’apparition et l’usage qui en est fait.

Deux principes retiendront ici notre attention, qui paraissent émerger de quelques arrêts de la Cour et revêtent assurément une évidente dimension éthique.

Il s’agit, d’une part, de ce que l’on appellera les principes essentiels d’humanité, et, d’autre part, de l’interdiction du recours à la force dans les relations entre les États. Si ce dernier principe relève effectivement au premier chef des relations interétatiques, alors que les premiers ont davantage pour centre de gravité le rapport qui s’établit entre les autorités étatiques et les personnes soumises à leur pouvoir, on doit observer néanmoins qu’ils ont ceci en commun qu’ils sont inspirés des exigences de respect de la dignité de l’être humain et de sa vie. C’est ici que l’on touche à la dimension éthique »[2].

Deux remarques liminaires s’imposent. La première concerne les contours de la notion d’éthique chez le Professeur Dominicé, pour lequel l’éthique relève de la morale : « [u]n principe d’éthique est une règle morale, une norme de comportement, inspirée par une valeur sociale de caractère transcendant, ayant pour tous une signification à certains égards absolue »[3]. Cette définition particulièrement vaste voire vague permet de ne pas précisément justifier en quoi telle ou telle notion relèverait de l’éthique des relations internationales, ou de l’éthique internationale – les deux termes étant employés de manière synonymique. Ainsi, l’auteur ne justifie à aucun moment l’appartenance des normes ou concepts étudiés au champ de l’éthique, présentant ce lien comme évident et incontestable[4].

Relevons ensuite que le Professeur Dominicé évoque la manière dont la Cour internationale de justice (ci-après : « la Cour ») intègre, dans l’ordre juridique international, des éléments d’éthique des relations internationales. Il n’est pas question, pour lui, d’analyser la mesure dont le droit international pertinent est ou non éthique par nature, mais seulement d’observer la manière dont l’éthique des relations internationales – une notion extra-juridique non définie, mais correspondant à un ordre moral spécifique – a pu trouver écho dans la jurisprudence de la Cour. Plus encore, la thèse de l’auteur est que certains principes de l’éthique des relations internationales ont été à l’origine de la formation de normes de droit international. Autrement dit, l’éthique des relations internationales constituerait une source matérielle de droit international, tout du moins dans la jurisprudence de la Cour.

Sur la base de la réflexion initiée par l’auteur, il est intéressant d’interroger la manière dont l’éthique peut être identifiée en tant que source matérielle d’une norme proscrivant le recours à la force – la question des « principes élémentaires d’humanité » pouvant faire l’objet d’analyses ultérieures – (I), avant d’élargir plus brièvement le cadre de pensée aux difficultés soulevées par ce constat (II).

 

I. L’éthique, source matérielle de l’interdiction coutumière du recours à la force

 

Pour le Professeur Dominicé, la Cour a décelé des « valeurs constitutives de l’éthique des relations internationales dans les principes fondamentaux d’humanité, ainsi que dans l’interdiction du recours à la force entre États », valeurs qui ont « pénétré la jurisprudence selon des critères juridiques solides, à savoir l’interprétation du droit, et l’identification de nouvelles normes »[5].

L’auteur ne plaide pas que l’interdiction du recours à la force telle qu’elle est formulée dans la Charte puiserait son origine dans l’éthique internationale. En revanche, il avance que la source matérielle de la norme coutumière interdisant le recours à la force, telle que reconnue par la Cour dans l’arrêt Nicaragua[6], réside principalement dans cette éthique. Le raisonnement de l’auteur repose sur le fait que la Charte ne codifie pas une règle existante en 1945, de sorte que c’est cette disposition qui a servi de support à la formation de la norme coutumière dégagée en 1986. Pourtant, « on ne saurait affirmer que, depuis 1945, une pratique constante et uniforme d’abstention du recours à la force puisse être observée »[7]. Autrement dit, l’examen du critère de la pratique constante aurait dû conduire la Cour à constater, en l’état du droit international, l’absence d’une telle règle coutumière. La Cour n’a donc pas réellement, malgré sa réaffirmation de la nécessité d’identifier ces deux éléments[8], procédé à une analyse rigoureuse de la pratique ; ou bien elle a volontairement éludé la question, faisant application de principes supérieurs innomés. La conclusion de l’exposé de Christian Dominicé peut être reproduite :

« Pour justifier son prononcé, la Cour a invoqué notamment le fait que les États qui ont eu recours à la force se sont généralement efforcés de se réclamer d’une exception à la règle. C’est dire qu’en somme les déclarations et convictions affichées sont à certains égards plus déterminantes que les comportements effectifs, ce que confirme le fait que la Cour accorde un grand poids à la proclamation répétée du principe d’interdiction du recours à la force dans des actes solennels tels la résolution 2625 (XXV) […] et l’Acte final d’Helsinki du 1er août 1975.

On peut se demander si, somme toute, ce n’est pas la seule opinio iuris qui est prise en considération, et s’interroger sur la pertinence de cette démarche. Peut-être est-il plus exact d’affirmer qu’en l’occurrence la « pratique constante et uniforme » a été reconnue au premier chef dans une succession d’affirmations, déclarations, documents, de telle sorte que la Cour a finalement privilégié le verbe par rapport à la réalité factuelle.

La parole a été faite chair, verbum caro, proclame l’Évangile, et voici que la Cour internationale de Justice vient dire que la parole répétée devient coutume, verbum consuetudo.

Pour comprendre un phénomène à première vue surprenant, il faut tenir compte, me semble-t-il, du contenu de la règle invoquée. En effet, lorsque la norme dont l’existence est invoquée devant elle est de caractère relativement technique, neutre du point de vue moral, la Cour, à juste titre, se montre exigeante en ce qui concerne l’élément matériel. En revanche, lorsqu’il s’agit d’un principe dont la signification morale, éthique, est évidente, comme l’interdiction du recours à la force, il est justifié d’en consacrer l’intégration au droit international général sans attendre qu’il soit strictement respecté, mais en se fondant sur des convictions uniformément proclamées, fussent-elles partiellement démenties par les faits »[9].

Il n’est pas niable – et peu nié à notre connaissance – que la Cour mène une politique jurisprudentielle parfois influencée, malgré la hauteur de ses fonctions, par des impératifs non juridiques. La Cour a notamment besoin d’entretenir son image, d’affirmer son autorité, de s’assurer que ses décisions seront globalement appliquées sans pour autant disposer de moyens coercitifs à cet effet, tout en veillant à la stabilité de son édifice jurisprudentiel et du droit international en général. Ainsi, elle évite par exemple de procéder à des revirements de jurisprudence si elle le peut[10], tout comme elle cherche parfois à éviter de se prononcer sur le fond d’une affaire si les conséquences diplomatiques et politiques paraissent démesurées[11]. Il n’est donc pas iconoclaste, a priori, de penser que le choix de la Cour dans l’affaire des Activités militaires a pu être guidé par des considérations non principalement juridiques.

En l’espèce, le raisonnement de la Cour sur la question du caractère coutumier de l’interdiction du recours à la force est, il faut l’admettre, particulièrement discutable. Dès son arrêt de 1984, la Cour semble déjà pré-admettre l’existence de cette norme coutumière, parmi d’autres[12]. Dans l’arrêt de 1986, la Cour, rappelant le paragraphe pertinent de son arrêt sur la compétence et la recevabilité, indique d’emblée et sans démonstration que « la Charte et le droit international coutumier procèdent tous deux d’un principe fondamental commun bannissant l’emploi de la force des relations internationales »[13]. Ce n’est qu’ensuite que la Cour estime devoir « maintenant identifier les règles du droit international coutumier applicables au présent différend »[14] : dans ces conditions et sans préjudice du raisonnement ultérieur, il paraîtrait pour le moins surprenant que la qualité de norme coutumière de l’interdiction du recours à la force soit finalement niée.

Le développement qui conduit à la Cour à reconnaitre cette coutume confirme que la logique juridique n’est pas la seule technique déployée à cette fin. Face aux difficultés évidentes de l’établissement d’une telle norme face à une pratique pour le moins hétérogène, la Cour prend le soin de préciser :

« [i]l ne faut pas s’attendre à ce que l’application des règles en question soit parfaite dans la pratique étatique, en ce sens que les États s’abstiendraient, avec une entière constance, de recourir à la force ou à l’intervention dans les affaires intérieures d’autres États. La Cour ne pense pas que, pour qu’une règle soit coutumièrement établie, la pratique correspondante doive être rigoureusement conforme à cette règle. Il lui paraît suffisant, pour déduire l’existence de règles coutumières, que les États y conforment leur conduite d’une manière générale et qu’ils traitent eux-mêmes les comportements non conformes à la règle en question comme des violations de celle-ci et non pas comme des manifestations de la reconnaissance d’une règle nouvelle. Si un État agit d’une manière apparemment inconciliable avec une règle reconnue, mais défend sa conduite en invoquant des exceptions ou justifications contenues dans la règle elle-même, il en résulte une confirmation plutôt qu’un affaiblissement de la règle, et cela que l’attitude de cet État puisse ou non se justifier en fait sur cette base »[15].

Comme le relève Christian Dominicé, l’exposé de la Cour se fonde ensuite essentiellement sur les arguments concordants des parties, sur la doctrine, et sur un ensemble de résolutions, textes et positions adopté par les parties, et peu sur une réelle « pratique », qui semble essentiellement découler de l’opinio juris. La doctrine a eu l’occasion de relever que la Cour « ne semble pas être en mesure de présenter une démonstration véritable […]. Ainsi son discours tient-il plus de la simple justification »[16] sur ce point. Le fameux paragraphe 186, cité ci-dessus, « constitue quasiment la seule référence à la pratique »[17] :

« […] La Cour escamote la pratique bien qu’elle l’ait présentée comme un élément nécessaire à l’émergence d’une règle coutumière. Deux explications peuvent être proposées. Peut-être la Cour a-t-elle renoncé à une tâche qu’elle estimait inutile ou impossible au regard des règles en question. Ou bien […] [l]a Cour ne chercherait, dans cette hypothèse, pas à démonter l’existence d’une règle coutumière en démontrant le processus de création de la coutume – alchimie sans doute rebelle à la démonstration objective – mais, plus simplement, à mettre en évidence qu’au moment où le différend intervint, les États reconnaissaient l’existence d’une règle coutumière établie »[18].

Dans les deux hypothèses, la Cour entretient un paradoxe, ces deux options contrevenant à la méthodologie qu’elle annonce[19]. Au-delà de la contradiction, l’on peut certes constater que « [c]ette optique est à la fois volontariste, dans la mesure où la pratique est déconsidérée au profit de la position exprimée par les États, et formaliste, dans la mesure où elle aboutit à la conclusion qu’une règle violée en fait est en même temps confirmée en droit »[20]. Il n’en demeure pas moins qu’un certain malaise se dégage de la lecture de l’intégralité de la « démonstration » de la Cour, non quant à la solution finalement retenue mais quant à la méthode déployée pour y parvenir. L’on en arrive finalement à l’idée selon laquelle la coutume permet parfois « de relier la règle juridique non seulement aux faits mais aussi aux valeurs morales et politiques […]. C’est dans cette perspective que, en recourant à la coutume, on permet à l’interprète de prendre en compte des considérations d’opportunité, et ainsi de faire coïncider la légalité et la légitimité, voire de brouiller les frontières entre la lex lata et la lex ferenda »[21].

En l’espèce et sans qu’il soit besoin de procéder à une revue exhaustive de la doctrine relative à cet arrêt, l’on peut effectivement déduire de la faiblesse et de la maladresse de la démonstration de la Cour que d’autres éléments sont entrés en jeu dans la décision. Il était évident, au regard du contexte des relations internationales, que l’interdiction du recours à la force devait être consacrée en tant que norme coutumière. Il est donc possible de qualifier la solution de la Cour de décision « éthique », au sens où elle constitue non pas la seule solution juridiquement acceptable, mais la meilleure décision à prendre au regard des critères classiques de l’éthique décisionnelle. Le juge a eu l’intention de promouvoir un système normatif stable depuis 1945 et indispensable pour sauvegarder des vies humaines, et non de mettre en danger l’un des piliers du droit international moderne en refusant de qualifier la norme invoquée de coutumière – ce qui aurait pourtant été, sur le plan juridique, globalement possible. Par ailleurs, les conséquences de sa décision sont favorables au maintien de la paix internationale, alors qu’une décision inverse aurait pu menacer l’édifice que représente la Charte.

La décision de la Cour d’affirmer l’existence d’une règle coutumière interdisant le recours à la force entre États est, donc, une décision fondée davantage sur l’éthique – qui prend, comme le Christian Dominicé le mentionne d’ailleurs, les formes d’une résurgence du droit naturel[22] – que sur un raisonnement juridique implacable. Cette conclusion soulève néanmoins de nombreuses questions.

 

II. La difficile détermination de la place, de la fonction et des limites de l’éthique dans la jurisprudence de la Cour

 

Que l’éthique puisse être identifiée comme une « force créatrice » du droit international est une chose ; l’on peut y voir un élément positif ou au contraire s’en inquiéter. Toutefois, l’exposé qui précède ne fait qu’analyser, de manière quelque peu décontextualisée d’ailleurs, un extrait d’une célèbre jurisprudence internationale sous l’unique prisme de l’éthique. De nombreuses problématiques en découlent, ouvrant autant de pistes de recherche ultérieures.

D’abord, il conviendrait de déterminer la mesure dans laquelle cette analyse peut être reproduite, voire systématisée, à propos d’autres raisonnements menés par la Cour internationale de justice et d’autres juges internationaux[23]. Une grille de lecture éthique de la logique juridique des arrêts de la Cour pourrait ainsi être dégagée et permettre d’affirmer, ou au contraire d’infirmer, la prégnance des considérations éthiques dans la jurisprudence internationale. La manière dont celles-ci déterminent parfois les choix de la Cour est tout aussi susceptible de recherches ultérieures : l’éthique n’intervient-elle qu’au stade du fond, ou irrigue-t-elle la vie de la Cour de manière générale, y compris dans l’organisation des audiences, les décisions d’ordre procédural, etc. ?

En deuxième lieu, rien n’indique que l’éthique ait été le seul, ni même le principal moteur de la décision de la Cour dans l’affaire des Activités militaires. Des considérations politiques peuvent être entrevues dans les lignes qui précèdent. D’autres pourraient être dégagées : la nécessité ressentie de faire évoluer les critères de détermination des normes coutumières, par exemple, pourrait être un autre angle d’approche du même extrait. Cette idée ouvre la porte à un second niveau de lecture : la supposée « nécessité ressentie » de faire prévaloir l’éthique sur la rigueur juridique, qui paraît établie dans l’affaire des Activités militaires, doit elle-même faire l’objet d’une réflexion. Dit autrement, la décision éthique n’existe que dans la mesure où des considérations supérieures déterminent la mesure dans laquelle l’enjeu éthique doit être d’une part pris en compte, d’autre part mis en balance avec d’autres éléments de la décision, à l’instar du formalisme juridique ou de la possibilité de faire évoluer le droit international. Ces considérations supérieures sont relativement inconnues du droit international et plus généralement de l’analyse juridique, laquelle a justement tendance à écarter les éléments non-juridiques du raisonnement. Elles renvoient à des éléments sociologiques, politiques voire anthropologiques, d’abord non aisés pour le juriste, et ne peuvent en tout état de cause qu’être devinées ou supputées, les délibérés demeurant secrets. Ce n’est qu’en reconstituant les diverses solutions juridiquement possibles, en tenant compte de l’ensemble des facteurs et du contexte de l’époque – ce qui paraît largement impossible – qu’il serait possible d’identifier la place exacte de l’éthique dans le processus décisionnel de « fabrication » de l’arrêt de la Cour[24]. Il n’est sans doute pas totalement anodin, à ce propos, que l’arrêt au fond dans l’affaire des Activités militaires ait donné lieu, à la Cour, au « délibéré le plus long de son histoire »[25]

En troisième lieu, le débat se heurte finalement à la définition de l’éthique. Peut-on identifier une « éthique des relations internationales » ? Est-elle identique, et dans la négative en quoi diffère-t-elle, d’une éventuelle « éthique internationale » ? Quels rapports cette éthique entretient-elle avec la morale, Christian Dominicé semblant considérer les termes comme synonymes ? Au-delà de ces questions dont la doctrine juridique, à juste titre focalisée sur leurs conséquences en droit, parvient globalement à faire abstraction, se pose celle, qui lui est consubstantielle, des limites de l’éthique. Si l’on admet que la Cour a fait prévaloir une considération éthique sur une considération de logique juridique dans l’affaire des Activités armées, faute de quoi elle aurait rigoureusement analysé et constaté l’absence de pratique puis rejeté la nature coutumière de la norme relative à l’interdiction du recours à la force, l’on doit relever qu’aucune frontière n’est tracée en la matière. Aucune ne pouvait d’ailleurs l’être, puisqu’elle reviendrait à admettre la fragilité, déjà manifeste, du raisonnement censé être parfaitement juridique. Autrement dit, il est loisible de penser que l’éthique occupe la place d’une valeur supérieure susceptible de justifier, sans limitation précise, la rectification d’un raisonnement rigoureusement formaliste qui lui contreviendrait trop directement, quitte à ce que sa prévalence affaiblisse ledit raisonnement, dont l’apparence de la rigueur juridique doit impérativement être préservée. En somme, l’enjeu éthique serait, faute de pouvoir être défini et surtout encadré, camouflé. Ce raisonnement pose néanmoins de nouvelles difficultés lorsqu’il est inversé : doit-on en déduire qu’un raisonnement parfaitement logique sur le plan juridique a écarté, ou intégré avec succès les enjeux éthiques supposés irriguer sa conclusion ?

En quatrième lieu et justement, les éléments qui précèdent dévoilent un certain nombre d’outils au service de la recherche des éventuelles considérations éthiques dans la jurisprudence de la Cour. L’un de ces indices réside dans le revirement de jurisprudence, dont la motivation est susceptible de reposer sur la mise en avant d’un enjeu éthique. Un autre indice réside justement dans la qualité de la motivation de la Cour sur tel ou tel point : les raisonnements les plus fragiles en droit sont susceptibles – mais seulement susceptibles – de révéler l’existence sous-jacente de considérations éthiques qui ont influencé le sens de la décision, sans que la Cour n’ait pu leur conférer une assise juridique suffisante. Sans qu’il soit possible de dégager à ce stade une méthode d’analyse permettant d’identifier formellement les considérations éthiques sous-jacentes dans la jurisprudence de la Cour, ces pistes fournissent ainsi une première grille permettant sa (re)lecture, et peut-être une analyse plus précise du contenu de « l’éthique internationale » invoquée par Christian Dominicé. Ces éléments rendent en tout cas à la fois plus complexe, et plus nécessaire, l’initiation d’une analyse systématique des arrêts de la Cour sous l’angle de l’éthique.

Enfin, la question des relations entre l’éthique et la consécration de la norme coutumière proscrivant le recours à la force ne peut se borner à l’analyse de la jurisprudence de la Cour dans l’affaire des Activités militaires. Tout en suggérant que l’éthique peut jouer un rôle significatif, sinon déterminant, dans le processus juridictionnel et à certains égards être considérée comme une source matérielle de certaines normes de droit international – seulement coutumières ? -, cet exemple invite à approfondir la question des origines éthiques de la norme conventionnelle relative à l’interdiction du recours à la force. Au regard du thème de cette contribution, il apparaît en effet indispensable de se demander si c’est finalement la norme étudiée qui implique la prééminence de l’éthique, et si oui pour quelle raison, ou si, au contraire, celle-ci ne présente pas de particularité notable, de sorte que le rôle de l’éthique dans le processus de formation du droit international – à la Cour et au-delà – pourrait s’avérer systémique.

 

 


 

[1] G. Ripert, Les forces créatrices du droit, LGDJ, 1955, 431 p.

[2] Ch. Dominicé, « La Cour internationale de Justice et l’éthique des relations internationales », in Ch. Dominicé, L’ordre juridique international entre tradition et innovation, PUF, 1997, pp. 45-55, accessible en ligne : https://books.openedition.org/iheid/1337. La citation est extraite des §§25-27.

[3] Ibid., §15.

[4] Par exemple §32 : « c’est en se référant expressément aux « considérations élémentaires d’humanité » – donc assurément à une notion éthique – qu’elle [la Cour] put préciser les contours de cette règle jusqu’à en déduire une obligation d’informer à la charge des autorités albanaises ». Le terme « assurément », renforçant le « donc » censé conclure une démonstration de cette appartenance au champ de l’éthique, est également employé §26 (voir la citation en exergue).

[5] Ibid., §52.

[6] CIJ, Activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci (Nicaragua/États-Unis), arrêt (fond), 27 juin 1986, CIJ Rec. 1986, §§181 et ss.

[7] Ch. Dominicé, « La Cour internationale de Justice et l’éthique des relations internationales », §43.

[8] CIJ, Activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci (Nicaragua/États-Unis), arrêt (fond), §183.

[9] Ch. Dominicé, « La Cour internationale de Justice et l’éthique des relations internationales », §§45-48.

[10] Il est par exemple rarissime que la Cour, saisie d’une demande en indication de mesures conservatoires, se déclare compétente prima facie dans une affaire et décline finalement sa compétence au stade des exceptions préliminaires. Le dernier cas réside dans l’affaire Géorgie c. Russie, dans laquelle la Cour infirme en 2011 l’analyse menée en 2008 au stade des mesures conservatoires, retenant finalement une exception d’incompétence (CIJ, Application de la convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale (Géorgie c. Fédération de Russie), exceptions préliminaires, arrêt du 1er avril 2011, CIJ Rec. 2011, §129). Mais l’on sait que ce choix s’explique en partie par un renouvellement des juges (M. DUBUY, « Application de la convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale (Géorgie c. Fédération de Russie), exceptions préliminaires : un formalisme excessif au service du classicisme ? », AFDI, vol. 57, 2011, p. 185), et qu’il a conduit un évident malaise reproduit dans l’opinion dissidente commune à cinq juges – dont le Président de la Cour : « il est néanmoins toujours fâcheux que la Cour ait rendu une décision juridiquement contraignante pour les parties dans une affaire dont elle constate, in fine, qu’elle n’a pas compétence pour en connaître, on pourrait légitimement s’attendre à ce qu’elle ne se place dans cette position inconfortable que lorsqu’elle découvre, à la suite du débat sur les exceptions préliminaires, de solides raisons qui lui avaient échappé dans un premier temps, la contraignant à décliner sa compétence » (Opinion dissidente commune de M. le juge Owada, Président, et de MM. les juges Simma et Abraham, Mme la juge Donoghue et M. le juge ad hoc Gaja, §86). Sur ce point, l’on se permet de renvoyer à notre note sur « La contribution de l’ordonnance Gambie c. Myanmar à l’élaboration d’un droit des mesures conservatoires », Revue du Centre Michel de l’Hospital, n°20, 2020, spéc. pp. 104-106, accessible en cliquant ici.

[11] L’on pense par exemple à la série de déclinaisons de compétence dans les affaires introduites par les Iles Marshall, qui semblait inéluctable.

[12] CIJ, Activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci (Nicaragua c. États-Unis d’Amérique), compétence et recevabilité, arrêt du 26 novembre 1984, CIJ Rec. 1984, §73 : « [le Nicaragua] invoque un certain nombre de principes du droit international général et coutumier qui, d’après la requête, auraient été violés par les États-Unis. […] Des principes comme ceux du non-recours à al force, de la non-intervention, du respect de l’indépendance et de l’intégrité territoriale des États et de la liberté de navigation conservent un caractère obligatoire en tant qu’éléments du droit international coutumier, bien que les dispositions du droit conventionnel auxquels ils ont été incorporés soient applicables ».

[13] CIJ, Activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci (Nicaragua c. États-Unis d’Amérique), fond, arrêt du 27 juin 1986, CIJ Rec. 1986, §181.

[14] Ibid., §183.

[15] Ibid., §186.

[16] P.-M. Eisemann, « L’arrêt de la CIJ dans l’affaire des activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci (Nicaragua c. États-Unis), fond, arrêt du 27 juin 1986 », AFDI, vol. 32, 1986, p. 174, accessible en cliquant ici.

[17] Ibid., p. 173.

[18] Ibid., pp. 173-174.

[19] Voir notamment le §184 de l’arrêt, par lequel la Cour relève que « les Parties semblent être largement d’accord, comme on le verra plus loin, sur la teneur du droit international coutumier relatif au non-emploi de la force et à la non-intervention. Cet accord des Parties ne dispense cependant pas la Cour de toute recherche des règles applicables de ce droit. La Cour ne saurait considérer des règles comme faisant partie du droit international coutumier et applicables en tant que telles à des États simplement parce que ceux-ci affirment les reconnaître. […] La Cour doit s’assurer que l’existence de la règle dans l’opinio juris des États est confirmée par la pratique » (§184).

[20] O. Corten, F. Dubuisson, V. Koutroulis, A. Lagerwall, Une introduction critique au droit international, Éditions de l’ULB, 2017, p. 336.

[21] O. Corten, Le droit contre la guerre, 2ème ed., Pedone, 2014, pp. 12-13.

[22] Ch. Dominicé, « La Cour internationale de Justice et l’éthique des relations internationales », §49.

[23] Le professeur Dominicé, comme indiqué en début d’article, identifie plusieurs manifestations de cette prépondérance ponctuelle de l’éthique des relations internationales dans la jurisprudence de la Cour.

[24] L’on emprunte l’expression à M. Bedjaoui, « La « fabrication » des arrêts de la Cour internationale de justice », in Le droit international au service de la paix, de la justice et du développement. Mélanges Michel Virally, Pedone, 1991, pp. 87-107.

[25] Ibid., p. 105.

 

Pour citer cette note : MAUREL Raphaël, « De l’éthique dans la jurisprudence de la Cour internationale de justice ? L’exemple de l’interdiction du recours à la force dans l’arrêt Activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci », Blog INTER-ÉTHIQUE, septembre 2020, en ligne : https://blog.u-bourgogne.fr/droit-inter-ethique/2020/09/28/de-lethique-dans-la-jurisprudence-de-la-cour-internationale-de-justice-lexemple-de-linterdiction-du-recours-a-la-force-dans-larret-activites-militaires-et-paramilitaires-au-nicaragua-et-c-c/

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