Argumentaire

 

Entre la recherche et l’action : intentionnalité, collaboration et transformation

 

La transformation au cœur de la recherche-action

Les intentions de transformation sur le terrain font de la recherche-action un outil cognitif et politique de production de connaissances tel qu’a pu le concevoir John Dewey (1939) pour qui l’enquête sociale consiste à accompagner et à trouver des solutions, plutôt qu’à chercher des vérités. Elle est ainsi considérée comme une alternative aux recherches à dominance positiviste (Lenoir, 2012). La recherche-action continue de se construire au gré des études menées selon des positionnements méthodologiques et épistémologiques hétérogènes. Dernièrement, cette démarche s’est enrichie d’un questionnement concernant les échanges et les modalités relationnelles entre les acteur·rices et les chercheur·ses. Ces évolutions nous invitent à penser de nouvelles épistémologies par lesquelles chercheur·ses et acteur·rices entrent dans un rapport de coproduction des connaissances (Coenen, 2012) et interrogent la scientificité des savoirs pratiques et la légitimité des savoirs non-scientifiques et qui incite à la production de savoirs intelligibles et applicables sur le terrain. La recherche par l’action s’inscrit ainsi dans une perspective de transformation collaborative d’une situation donnée. Cette troisième rencontre sera l’occasion d’interroger, dans un premier axe de travail, la nature ou le type de transformation dont la recherche-action est génératrice. D’autre part, cette dimension transformatrice implique un certain degré d’intentionnalité et d’engagement mutuel entre chercheur·ses et acteur·rices qui constitueront les deuxième et troisième axes de réflexion.

L’intentionnalité dans la démarche

La recherche par l’action se met en place au carrefour entre chercheur·ses, acteur·rices et terrain. C’est dans cet espace que se définissent les buts et objectifs de la recherche et que se croisent des intentions multiples voire contrastées. Ces intentions s’imbriquent dans des dispositifs préexistants à la recherche (Monceau, 2016) et peuvent aussi évoluer en fonction du contexte institutionnel, social, politique ou des relations entre les participant·es. Ces évolutions et rencontres d’intentions peuvent contribuer, en tant que telles, à une transformation des actions de terrain et d’une recherche qui s’élabore. Elles peuvent également changer les
modalités de la recherche qui peut ainsi être repensée, adaptée ou transformée dans cette dialectique d’intentionnalités sur le terrain. Ce deuxième axe de travail propose d’explorer quelques-uns des enjeux de l’intentionnalité des chercheur·ses et acteur·rices et ses incidences sur la démarche.

L’engagement mutuel : constituer des réseaux ou communautés de recherche ?

Enfin, la recherche par l’action se réalise à travers des modalités participatives et des degrés d’engagement qui dépendent des objectifs et des positionnements de chacun·e. Différents types de recherche-actions peuvent être mises en place autour de diverses modalités d’engagement avec les sujets et dans le monde (Ingold, 2013). C’est alors le degré de participation des chercheur·ses et des acteur·rices qui est mis à penser (Giddens, 1987, Vinatier & Morrissette, 2015). Il peut s’appréhender du côté de la prise en compte des actions ou créations des acteur·rices ou d’une visée participative ou collaborative. Cet engagement réciproque peut également impliquer la constitution d’une communauté de recherche ou d’un collectif œuvrant vers la transformation sur un terrain donné. Nous posons ainsi la question, dans ce troisième axe de travail, de la construction du rapport entre le·la chercheur·se et les acteur·rices et de la manière de concevoir le niveau d’implication ; deux éléments qui peuvent influer sur les modalités de la recherche : faire avec, faire ensemble ?

La visée transformative de la recherche-action peut se jouer à la fois dans les interactions entre chercheur·ses, acteur·rices et terrain et dans la dynamique de la recherche. Nous proposons d’interroger la démarche de recherche-action du point de vue de son processus, de ses entraves, perturbations, improvisations et transformations multiples. Un processus de co-construction du terrain de recherche, mais également de la démarche de recherche même, au regard des situations rencontrées (Kagan, 2007).

Axes de travail :

  • De quels types de transformations la recherche-action peut-elle être génératrice ? Quel est le statut des savoirs et des connaissances produites, au regard du type de transformation ?
  • Quelles intentions du·de la chercheur·se et des acteur·rices prennent place dans la collaboration ? Comment sont-elles modifiées ou clarifiées par la confrontation avec les réalités du terrain ?
  • Quelle est la relation entre la transformation de la réalité et le degré d’engagement des chercheur·ses et acteur·rices sur le terrain ?
  • Dans quelles mesures ce processus peut-il permettre de constituer des communautés de recherche et d’action par une intention commune ?
  • Quelles limites peut-on envisager, comment, quand et pourquoi les définir ?

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